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L'imposition sur le revenu des personnes physiques en Italie (IRPEF)

  • Rodolphe Rous
  • 7 avr.
  • 15 min de lecture



1. Contexte général


L’Italie dispose d’un système fiscal complexe et structuré, dont l’un des principaux piliers est l’impôt sur le revenu des personnes physiques, connu sous l’acronyme IRPEF (Imposta sul reddito delle persone fisiche). Cet impôt représente un élément central du financement de l’État italien et de ses différentes missions de service public. Il est régi principalement par le Testo Unico delle Imposte sui Redditi (TUIR), adopté par le Décret Présidentiel (D.P.R.) n° 917 du 22 décembre 1986, et par les dispositions connexes contenues dans divers décrets, lois de finances annuelles, réglementations administratives et circulaires émises par l’Agenzia delle Entrate (l’équivalent italien de l’administration fiscale).


2. Évolution historique et cadre constitutionnel


2.1. Origines de l’impôt sur le revenu en Italie


L’introduction d’un impôt général sur le revenu en Italie remonte à la première moitié du XXe siècle. L’idée d’imposer la population sur la base d’un revenu global et progressif s’est développée à la fin du XIXe et au début du XXe siècle, au moment où la plupart des pays européens mettaient en place des dispositifs analogues afin de financer l’industrialisation, les infrastructures et les dépenses publiques croissantes.


Au fil du temps, la législation fiscale italienne s’est dotée d’une série de taxes et d’impositions, parfois fractionnées par catégorie de revenus. Ce n’est qu’à partir des années 1970 et 1980 que le régime de l’IRPEF a pris sa forme contemporaine, avec la volonté de simplifier et d’unifier le traitement fiscal de la plupart des revenus perçus par les personnes physiques. Enfin, la codification principale dans le Testo Unico delle Imposte sui Redditi (TUIR) est intervenue en 1986, consolidant les règles et fournissant une base législative cohérente.


2.2. Principes constitutionnels applicables


Le fondement constitutionnel de l’IRPEF réside dans plusieurs articles de la Constitution de la République italienne (1947), notamment :

  • Article 2 : qui consacre le principe de solidarité sociale, l’impôt étant considéré comme un mécanisme de solidarité nationale.

  • Article 3 : qui établit l’égalité de tous les citoyens devant la loi et, par extension, devant les charges publiques. L’imposition progressive basée sur la capacité contributive (principe de progressivité) vise à concrétiser cette égalité.

  • Article 53 : qui consacre l’obligation pour chaque citoyen de contribuer aux dépenses publiques en fonction de sa capacité contributive. Cette disposition est le socle direct de la progressivité de l’impôt sur le revenu.


Il s’agit donc d’un système constitutionnellement ancré, qui confie au législateur la tâche de définir la structure et les modalités d’application de l’impôt, tout en respectant les principes de progressivité, de généralité et d’égalité.


3. Cadre législatif de l’IRPEF


3.1. Le Testo Unico delle Imposte sui Redditi (TUIR)


La base légale la plus importante de l’IRPEF est contenue dans le D.P.R. n° 917 du 22 décembre 1986, communément appelé Testo Unico delle Imposte sui Redditi (TUIR). Ce texte regroupe et organise la plupart des dispositions relatives à l’imposition sur le revenu, tant pour les personnes physiques que pour les sociétés.


Le TUIR est divisé en plusieurs parties, dont :

  • Partie I : Dispositions générales (définitions, champ d’application, principes d’imposition, etc.)

  • Partie II : Dispositions spécifiques à l’IRPEF, détaillant notamment les catégories de revenus imposables, les abattements, les crédits d’impôt, etc.

  • Partie III : Dispositions spécifiques à l’IRES (Imposta sul reddito delle società), l’impôt sur les sociétés, qui présente des différences techniques et conceptuelles par rapport à l’IRPEF.


Au fil des années, le TUIR a été modifié à de nombreuses reprises par diverses lois de finances et autres actes législatifs. Les références à citer dans les contentieux ou les analyses fiscales se basent généralement sur les articles numérotés du TUIR, par exemple : Articles 1 à 15 pour les principes généraux, Articles 49 à 52 pour les revenus du travail, Articles 67 et suivants pour les plus-values, etc.


3.2. Autres textes normatifs et circulaires de l’Agenzia delle Entrate


En complément du TUIR, de nombreuses dispositions relatives à l’IRPEF sont régulièrement précisées ou interprétées par :

  • Les lois de finances annuelles (Legge di Bilancio), qui peuvent modifier les taux, les crédits d’impôt, introduire de nouvelles dispositions transitoires, etc.

  • Les décrets-lois (Decreti-Legge) et décrets législatifs (Decreti Legislativi) qui adaptent la législation à la conjoncture économique ou aux orientations budgétaires urgentes.

  • Les circulaires et résolutions de l’Agenzia delle Entrate, qui jouent un rôle majeur dans la clarification des textes législatifs et dans l’orientation des contribuables et des professionnels. Ces circulaires, bien que n’ayant pas la valeur d’une loi, servent d’interprétation officielle et sont souvent déterminantes devant la juridiction administrative et fiscale.


L’IRPEF doit donc être appréhendé à la lumière d’un ensemble de dispositions législatives, réglementaires et administratives, constamment mises à jour pour répondre aux besoins socio-économiques du pays.


4. Champ d’application et territorialité


4.1. Personnes soumises à l’IRPEF


Aux termes de l’Article 1 du TUIR, l’IRPEF frappe le revenu de toute personne physique considérée comme fiscalement résidente en Italie. Par ailleurs, il est également perçu sur les revenus de source italienne perçus par des non-résidents, selon des modalités spécifiques.


Pour être considéré comme résident fiscal en Italie, il faut remplir l’une des conditions posées à l’Article 2 du TUIR :

  1. Être inscrit pendant la majeure partie de l’année au registre de la population résidente (Anagrafe della Popolazione Residente).

  2. Avoir en Italie son domicile ou sa résidence au sens du Code civil italien.

  3. Avoir le centre principal de ses intérêts économiques ou affectifs en Italie.


Ainsi, toute personne répondant à ces critères se voit soumise à l’imposition sur l’ensemble de ses revenus mondiaux selon le principe de mondialité (worldwide income principle). Les non-résidents, quant à eux, ne sont imposés que sur leurs revenus de source italienne, selon le principe de territorialité restreinte.


4.2. Territorialité et application aux non-résidents


En vertu du principe de territorialité, les revenus ayant une source italienne sont imposables en Italie, même lorsque le bénéficiaire n’a pas la résidence fiscale. Pour éviter la double imposition internationale, l’Italie a conclu de nombreuses conventions bilatérales avec d’autres États, sur la base du Modèle OCDE. Ces conventions spécifient généralement les modalités d’imposition dans les deux pays et préviennent qu’un même revenu soit imposé deux fois. Les règles d’élimination de la double imposition varient en fonction des traités, mais incluent souvent :

  • L’exonération totale ou partielle du revenu dans l’un des deux pays.

  • L’octroi d’un crédit d’impôt (foreign tax credit) dans le pays de résidence afin de tenir compte de l’impôt déjà payé dans le pays de la source des revenus.


Les dispositions de l’Article 3 du TUIR instaurent ainsi deux régimes d’imposition :

  1. Imposition illimitée (résidents) : sur les revenus de toutes provenances.

  2. Imposition limitée (non-résidents) : sur les seuls revenus produits en Italie.


5. Catégories de revenus imposables


Le TUIR répartit les revenus imposables en différentes catégories (appelées « catégories de revenus » ou categorie di reddito). Cette classification est cruciale pour déterminer le montant de l’impôt et les abattements ou allégements applicables.


5.1. Revenus du travail salarié (Redditi di lavoro dipendente)


  • Articles 49 à 52 du TUIR : Ces dispositions définissent les revenus du travail salarié, y compris les rémunérations, salaires, gratifications, indemnités et autres sommes perçues en contrepartie d’un travail dépendant.

  • Les indemnités de licenciement ou de départ à la retraite suivent un régime particulier de taxation.

  • Les avantages en nature (voiture de fonction, logement de fonction, etc.) sont également compris dans l’assiette imposable et sont évalués selon des critères spécifiques.


5.2. Revenus du travail indépendant (Redditi di lavoro autonomo)


  • Articles 53 à 54 du TUIR : Ils couvrent les revenus provenant de l’exercice d’une profession libérale ou d’une activité indépendante.

  • Les déductions pour frais professionnels sont admises à condition qu’ils soient inhérents à l’activité exercée et dûment justifiés.

  • Les règles de facturation et de TVA (bien que relevant d’une législation distincte) ont également un impact sur la détermination du revenu imposable net.


5.3. Revenus d’entreprise (Redditi d’impresa)


  • Articles 55 à 66 du TUIR : Ces dispositions s’appliquent aux entrepreneurs individuels et aux sociétés de personnes (dans la mesure où leur revenu est « transludé » aux associés).

  • Le calcul du revenu d’entreprise suit les règles fiscales spécifiques (inspirées du résultat comptable, puis adaptées via des variations fiscales).

  • Sont également prévus des régimes spéciaux pour les activités agricoles, artisanales ou certaines micro-entreprises (régimes forfaitaires).


5.4. Revenus de capitaux (Redditi di capitale)


  • Articles 44 à 48 du TUIR : Englobent les dividendes, intérêts, distributions d’OPCVM, etc.

  • L’imposition de ces revenus peut suivre des modalités distinctes (avec des retenues à la source libératoires ou des prélèvements forfaitaires), selon la nature du revenu et le type de placement.

  • Certaines formes de revenus de capitaux (obligations d’État, livrets d’épargne réglementée) bénéficient de taux réduits ou d’exonérations partielles.


5.5. Revenus fonciers (Redditi fondiari)


  • Articles 25 à 43 du TUIR : Les revenus fonciers se subdivisent en revenus de terrains (agricoles) et revenus de bâtiments (loyers, y compris ceux des immeubles d’habitation ou commerciaux).

  • Les modalités d’imposition sont fonction de la « rendita catastale » (valeur cadastrale) pour les immeubles non loués et du loyer effectif pour les biens locatifs.

  • Des abattements ou régimes particuliers existent pour la résidence principale ou les locations à usage d’habitation avec loyers réglementés.


5.6. Revenus divers (Redditi diversi)


  • Articles 67 et 68 du TUIR : Cette catégorie résiduelle inclut notamment les plus-values de cession de biens immeubles, la vente de participations, les gains résultant de certaines opérations financières, etc.

  • Les règles d’imposition varient fortement selon le type de revenu : par exemple, la plus-value immobilière est imposable si la vente intervient dans un certain délai après l’acquisition (sauf exceptions).


6. Principes de détermination de l’assiette imposable


6.1. Principe de globalité du revenu


Selon l’Article 3 du TUIR, l’IRPEF se calcule sur la somme de tous les revenus appartenant aux catégories mentionnées ci-dessus, déduction faite des charges admises. C’est le principe de la globalité ou « unitarietà del reddito » : tous les revenus perçus par le contribuable au cours de l’année fiscale sont cumulés pour aboutir à un revenu global net.


6.2. Déductions et abattements


Le contribuable peut déduire certaines charges de son revenu brut, aboutissant au revenu imposable net. Parmi les déductions les plus courantes :

  • Les cotisations de sécurité sociale obligatoires.

  • Certaines dépenses médicales (éventuellement assorties d’une franchise).

  • Les pensions alimentaires versées en exécution d’une obligation légale.

  • Dans certains cas, les intérêts d’emprunt immobilier contractés pour l’achat de la résidence principale (sous réserve de plafonds et conditions de durée).


Par ailleurs, il existe des abattements (ou deduzioni et detrazioni), qui peuvent réduire directement l’impôt dû (et non le revenu imposable). Exemple : des crédits d’impôt pour charges familiales (enfants à charge) ou pour certains travaux d’amélioration énergétique.


6.3. Frais professionnels et charges inhérentes


Pour les revenus d’entreprise ou de travail indépendant, la base imposable est déterminée en retranchant du montant global des recettes les frais et charges professionnelles nécessaires à la production du revenu (matières premières, location des locaux, amortissements, etc.). Les Articles 109 à 113 du TUIR définissent, par exemple, les principes de déductibilité et de rattachement des charges pour les entreprises.


7. Taux d’imposition et progressivité


7.1. Barème progressif de l’IRPEF


L’IRPEF est un impôt progressif par tranches. Cela signifie que le revenu imposable est divisé en tranches successives, chacune étant soumise à un taux spécifique. Les tranches sont actualisées périodiquement par le législateur et peuvent être modifiées via les lois de finances. À titre d’exemple simplifié, un barème (fictif à visée illustrative) pourrait être :

  1. 0 à 15 000 € : 23 %

  2. 15 001 à 28 000 € : 27 %

  3. 28 001 à 50 000 € : 38 %

  4. 50 001 à 75 000 € : 41 %

  5. Plus de 75 000 € : 43 %


(NB : Les taux et tranches effectives peuvent varier selon les années et les réformes. Il convient toujours de se référer au tableau actualisé dans la législation et les circulaires de l’Agenzia delle Entrate.)


Le caractère progressif satisfait à l’exigence constitutionnelle (Article 53 de la Constitution italienne) selon laquelle le système fiscal doit être informé par des critères de progressivité et d’équité.


7.2. Addition d’impôts régionaux et communaux


En plus de l’IRPEF « national », les régions et les communes peuvent appliquer des additions régionales (Addizionale regionale all’IRPEF) et des additions communales (Addizionale comunale all’IRPEF). Le taux de ces addizionali varie en fonction des collectivités territoriales et s’ajoute au taux national.

  • La majoration régionale est définie par chaque région dans une certaine fourchette autorisée par la loi de l’État.

  • La majoration communale est également fixée localement, généralement dans la limite d’un plafond maximum déterminé au niveau national.


Ces addizionali sont également calculées sur le revenu imposable global, mais font l’objet d’un calcul séparé sur l’avis d’imposition.


8. Obligations déclaratives et modalités de paiement


8.1. Déclaration des revenus (Modello 730 ou Modello Redditi)


Les contribuables doivent déclarer leurs revenus annuels via les formulaires prévus à cet effet, en général avant la date limite fixée par la loi (souvent au printemps ou en été pour l’année précédente) :

  1. Modello 730 : Formulaire simplifié destiné principalement aux salariés et retraités.

  2. Modello Redditi PF (ex-Modello UNICO ) : Formulaire plus complet pour les indépendants, les personnes détenant des revenus d’entreprise ou des revenus étrangers complexes.


Les déclarations se font de plus en plus par voie électronique, directement ou par l’intermédiaire d’un Centro di Assistenza Fiscale (CAF) ou d’un professionnel habilité (expert-comptable, fiscaliste, etc.).


8.2. Retenue à la source et acomptes


  • Les travailleurs salariés subissent une retenue à la source (précompte) opérée par l’employeur. Celle-ci est ensuite versée à l’administration fiscale.

  • Les travailleurs indépendants et les entrepreneurs individuels paient l’impôt via un système d’acomptes et de solde. Les acomptes (normalement deux versements au cours de l’année) sont calculés sur la base de l’impôt payé l’année précédente. Le solde est versé l’année suivante après la déclaration définitive.


8.3. Contrôle et recouvrement


L’Agenzia delle Entrate dispose de pouvoirs de contrôle et de vérification. Les Articles 31 à 43 du D.P.R. n° 600/1973 fixent les modalités de contrôle des déclarations, la correction d’office, la notification de redressement, etc. Les contribuables disposent de voies de recours administratives et juridictionnelles pour contester un éventuel redressement, en saisissant, le cas échéant, la Commissione Tributaria (commission fiscale).


9. Exonérations, crédits d’impôt et régimes particuliers


9.1. Exonérations légales


Plusieurs types de revenus peuvent être exonérés ou exclus de l’assiette de l’IRPEF, pour des motifs sociaux ou économiques. Par exemple :

  • Certaines prestations sociales ou allocations familiales.

  • Les bourses d’études attribuées par l’État ou des organismes reconnus pour les étudiants.

  • Les revenus agricoles de très petite envergure peuvent bénéficier d’une exonération partielle.


9.2. Crédits d’impôt (Detrazioni)


Les detrazioni sont des crédits qui viennent en déduction de l’impôt. Parmi les plus connus :

  • Crédit d’impôt pour frais de rénovation énergétique : visant à encourager la modernisation énergétique des habitations.

  • Crédit d’impôt pour frais de rénovation de l’habitat (bonus casa).

  • Crédits pour charges familiales : dépendant du nombre d’enfants, de leur âge, et des conditions de ressources.


9.3. Régimes forfaitaires et avantages spécifiques


Certaines catégories de contribuables (notamment les micro-entreprises, les auto-entrepreneurs ou les jeunes professionnels) peuvent opter pour un régime forfaitaire (regime forfettario), caractérisé par un taux d’imposition fixe et une comptabilité simplifiée. Les conditions pour en bénéficier sont fixées par la loi de finances et concernent surtout des seuils de chiffre d’affaires et l’absence de certaines causes d’exclusion (associés de sociétés, revenus supérieurs à un certain seuil, etc.).


10. Modalités de contrôle et contentieux


10.1. Pouvoirs de l’Agenzia delle Entrate


L’Agenzia delle Entrate est l’administration compétente pour gérer et recouvrer l’IRPEF. Ses pouvoirs incluent :

  • L’émission de circulaires et résolutions pour clarifier l’interprétation des lois.

  • L’accès aux données bancaires, dans le respect des garanties légales, pour lutter contre l’évasion fiscale.

  • La vérification sur place de la comptabilité des entreprises ou des travailleurs indépendants.

  • L’échange d’informations avec d’autres administrations fiscales étrangères, conformément aux conventions internationales.


10.2. Procédure de redressement et sanction


Lorsqu’une infraction est décelée (omission de déclaration, sous-évaluation des revenus, dissimulation d’assiette, etc.), l’administration fiscale notifie un avviso di accertamento ou avviso di rettifica. Les infractions peuvent entraîner :

  • Le paiement des droits supplémentaires (impôts éludés).

  • Des amendes proportionnelles à la gravité de la violation.

  • Des intérêts de retard calculés au taux légal.


Les sanctions sont graduées en fonction du type et de la gravité de la fraude, et de la récidive éventuelle. Dans les cas les plus graves, des poursuites pénales pour délit fiscal peuvent être engagées (Articles 2 et suivants du Décret Législatif n° 74/2000).


10.3. Voies de recours


En cas de désaccord avec le redressement, le contribuable peut :

  1. Introduire un recours gracieux directement auprès de l’Agenzia delle Entrate, éventuellement dans le cadre d’une conciliation ou d’une médiation.

  2. Saisir la Commissione Tributaria Provinciale (Commission fiscale de premier degré).

  3. En cas d’appel, la décision peut être portée devant la Commissione Tributaria Regionale.

  4. Enfin, il est possible d’engager un recours en Cassation pour des questions de droit, devant la Corte di Cassazione.


11. Régime fiscal des non-résidents et conventions internationales


11.1. Non-résidents et revenus imposables


Comme indiqué précédemment, les non-résidents ne sont imposés que sur leurs revenus de source italienne. Les modalités d’imposition dépendent du type de revenu (foncier, financier, professionnel, etc.) et des dispositions de la convention fiscale applicable, le cas échéant.


11.2. Application des conventions fiscales bilatérales


L’Italie a ratifié un grand nombre de conventions bilatérales basées sur le Modèle OCDE.


Elles précisent, pour chaque catégorie de revenu (intérêts, dividendes, redevances, revenus professionnels, etc.), quel État dispose du droit d’imposition principal et si l’autre État peut imposer le même revenu, avec obligation de prévoir un mécanisme de crédit ou d’exemption.


Les contribuables résidant dans un État ayant conclu une convention avec l’Italie doivent en principe produire un certificat de résidence fiscale et se référer aux dispositions conventionnelles pour bénéficier d’éventuels taux réduits ou d’exonérations à la source.


11.3. Nouveau régime « Impatriati » et « flat tax » pour retraités étrangers


Dans le cadre d’une politique d’attractivité, l’Italie a instauré des régimes fiscaux de faveur pour inciter certains non-résidents à s’installer dans le pays :

  • Le régime des impatriati (Article 16 du Décret Législatif n° 147/2015, modifié ultérieurement) permet aux travailleurs hautement qualifiés qui transfèrent leur résidence en Italie de bénéficier d’une exonération partielle de leurs revenus du travail.

  • Une flat tax (impôt forfaitaire) a été introduite pour certains retraités étrangers s’installant dans le sud de l’Italie, avec un taux d’imposition très avantageux (souvent 7%) sur les pensions perçues de l’étranger.


12. Aspects pratiques : calcul et exemples illustratifs


12.1. Exemple de calcul simplifié


Imaginons un contribuable résident percevant :

  • 20 000 € de revenus du travail salarié.

  • 5 000 € de revenus fonciers (loyers).


Supposons qu’il ait droit à :

  • 2 000 € de charges déductibles (cotisations sociales, etc.).

  • Un crédit d’impôt pour enfant à charge de 600 €.

  • Revenu brut global = 20 000 + 5 000 = 25 000 €.

  • Revenu net imposable = 25 000 – 2 000 = 23 000 €.

  • Application du barème progressif (exemple fictif) :

    • Tranche 0 – 15 000 € = 23 %, soit 3 450 €

    • Tranche 15 001 – 23 000 € = 27 %, sur 8 000 € = 2 160 €

    • Total impôt brut = 3 450 + 2 160 = 5 610 €.

  • Déduction du crédit d’impôt (600 €) = Impôt net = 5 010 €.

  • Addizionali régionale et communale (à titre d’exemple, 1,2 % total sur le revenu) = 1,2 % * 23 000 = 276 €.

  • Montant total dû = 5 010 + 276 = 5 286 €.


Bien évidemment, ce simple calcul ne prend pas en compte toutes les spécificités et éventuels autres abattements. Il illustre néanmoins la logique de base.


12.2. Éventuelles retenues à la source


Si le contribuable est salarié, une partie de l’IRPEF a pu déjà être payée tout au long de l’année via la retenue à la source. Le solde (ou le remboursement) sera calculé lors de la déclaration.


13. Sanctions pénales en cas de fraude fiscale


En dehors des sanctions administratives, certaines infractions graves relèvent du droit pénal fiscal régi par le Décret Législatif n° 74/2000. Par exemple :

  • La déclaration frauduleuse par utilisation de factures ou autres documents pour opérations inexistantes (Article 2).

  • La déclaration frauduleuse par d’autres artifices (Article 3).

  • L’émission de factures ou autres documents pour opérations inexistantes (Article 8).

  • L’omission de déclaration (Article 5) et l’omission de paiement de l’IRPEF retenue à la source (Article 10-bis).


Les peines encourues varient selon le montant de l’impôt éludé et la gravité de la manœuvre frauduleuse. Ces sanctions peuvent aller de lourdes amendes jusqu’à des peines d’emprisonnement, faisant ainsi de la lutte contre l’évasion fiscale une priorité pour l’État italien.


14. Jurisprudence et contentieux récents


14.1. Rôles de la Cour de Cassation et de la Cour constitutionnelle

  • La Cour de Cassation (Section Fiscale) est la plus haute juridiction d’appel pour les affaires fiscales, fournissant une interprétation unificatrice du droit.

  • La Cour constitutionnelle peut être saisie pour vérifier la conformité des dispositions fiscales (taux, modalités de calcul, etc.) aux principes fondamentaux de la Constitution, notamment l’Article 53.


14.2. Tendances récentes de la jurisprudence


Les jurisprudences récentes portent souvent sur :

  • La détermination du lieu de résidence fiscale dans les situations transfrontalières complexes (travailleurs frontaliers, dirigeants d’entreprises multinationales, etc.).

  • Les questions de déductibilité de certaines charges (frais de représentation, véhicules, etc.).

  • L’abus de droit fiscal (une structuration artificielle d’opérations dans le but d’échapper à l’IRPEF).


Dans la plupart des cas, les juges confirment l’importance du substance over form, c’est-à-dire la nécessité d’apprécier la réalité économique plus que la forme juridique des opérations.


15. Perspectives de réforme et enjeux socio-économiques


15.1. Simplification et réduction de la pression fiscale

Le système italien de l’IRPEF est souvent jugé complexe, avec de multiples taux, tranches, crédits d’impôt et addizionali locales. Les gouvernements successifs ont envisagé des projets de réforme pour :

  • Simplifier la structure en réduisant le nombre de tranches.

  • Abaisser la pression fiscale sur les classes moyennes.

  • Encourager l’investissement et la consommation pour relancer la croissance économique.


15.2. Lutte contre l’évasion et l’évitement


Malgré une architecture légale fournie, l’Italie souffre d’un taux élevé d’évasion fiscale. Les pouvoirs publics renforcent donc :

  • Les contrôles : utilisation d’outils de data-mining, raccordement des bases de données bancaires, etc.

  • Les sanctions : afin de dissuader les contribuables d’élaborer des schémas d’évasion.

  • Les accords internationaux : pour échanger automatiquement des informations sur les comptes détenus à l’étranger.


15.3. Impact social et redistribution


L’IRPEF reste le principal instrument de redistribution de la richesse en Italie, car la progressivité de l’impôt est censée limiter les inégalités. Toutefois, la multiplication des crédits d’impôt, déductions et régimes spéciaux peut en diminuer la lisibilité et parfois créer des niches fiscales contestées.



Conclusion


L’impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPEF) constitue le cœur du financement public en Italie. Il s’agit d’un impôt d’une grande complexité technique, régulé par de nombreux textes législatifs et règlementaires (principalement le D.P.R. n° 917/1986, dit TUIR), et adapté en permanence aux besoins budgétaires et économiques du pays. Son caractère progressif reflète les principes constitutionnels d’égalité, de solidarité et de capacité contributive, imposés par la Constitution italienne (en particulier l’Article 53).


Pour autant, l’IRPEF n’est pas exempt de critiques : complexité, taux élevés pour certains contribuables, et disparités régionales liées aux addizionali. Les réformes en cours ou à venir viseront vraisemblablement à simplifier et à rendre l’IRPEF plus équitable, tout en conservant un haut niveau de recettes nécessaire au fonctionnement de l’État et des collectivités territoriales. Dans cette perspective, la lutte contre l’évasion fiscale demeure un enjeu majeur, car elle conditionne à la fois la justice fiscale et l’efficacité globale du système.


En définitive, l’IRPEF n’est pas qu’une simple formalité déclarative ou un ensemble de calculs : il est l’expression de la solidarité collective et du pacte social italien. Pour les contribuables comme pour les professionnels du droit fiscal, en comprendre les mécanismes et les évolutions représente une nécessité, tant d’un point de vue juridique que pratique.

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